CHILDHOOD. Qui a dit qu'il était facile de vivre entre un père violent et schizophrène, et une mère alcoolique ? Troisième d'une famille qui comptera finalement onze enfants Lullaby a toujours eu du mal à trouver sa place ; à commencer par se demander pourquoi elle était venue au monde. La réponse était pourtant simple : sa génitrice pondait des enfants pour pouvoir dépendre des allocations et passer ses journées à boire sans avoir à se soucier de se trouver un travail. Payer les factures était une tâche incombant à son incapable de mari, du moins quand il y pensait mais il n'était pas rare qu'elle douche un bébé à l'eau froide ou les nourrisse à la purée parce qu'elle n'avait plus de lait maternisé et que donner le sein la répugnait. Bref. Ses parents n'étaient que deux parfaits imbéciles n'ayant jamais compris la valeur de la vie d'un enfant, et la petite n'a toujours pu compter que sur ses aînés, à commencer par Lean qui l'a toujours protégée du mieux qu'il pouvait du bordel de cette vie miteuse. Ou du moins qui essayait ...

GIRLHOOD. Servir de punching ball à son père. Trouver sa mère au lit avec son petit copain. Devoir renoncer à ses études pour travailler, et aider Lean et Rainbow à payer les factures. Supporter que sa mère porte un autre enfant. Autant dire que l'adolescence de la jolie Lulla a été riche en déceptions et en coups durs. Le seul point positif qu'elle en ait elle-même retenu est sans aucun doute sa rencontre avec Ashley, ce rebelle aux faux airs androgynes qui l'a immédiatement adorée et s'est plié en quatre pour lui réapprendre à sourire. C'est chez lui qu'elle se réfugiait le weekend. Lui qui s'est assuré qu'elle aurait son permis. Lui qui les dépannait quand ils avaient besoin d'argent. Lui encore qui répondait présent quand il fallait venir la chercher à l'hôpital et qu'elle n'osait pas appeler son frère, qui était pris entre trois boulots à mi-temps et tous les gamins qui s'agitaient dans l'appartement - quatre enfants entre trois et un an, ça occupe. Lui qui lui a payé sa désixtox alors qu'à seize ans tout le monde avait abandonné l'espoir qu'elle lâche la bouteille et devienne une femme bien. Pour faire court : adolescence = merde, Ashley = sauveur. J'peux pas dire mieux.

YOUTH. Vingt ans. Ça peut paraître irréfléchi de quitter sa famille à seulement vingt ans pour partir habiter avec son meilleur ami. Pourtant la blonde ne s'est pas un instant demandé si c'était correct ou non et lorsqu'Ashley lui a proposé de partir habiter avec elle à LA, elle a accepté sans même se demander si c'était la bonne décision. Elle a alors laissé là ses frères, ses sœurs, les bébés, les factures impayées, les mauvais souvenirs et ne prenant avec elle que le peu d'argent de poche dont elle disposait et quelques tenues avant de rejoindre la vieille chevrolet toute pourrie de son rebelle de meilleur ami qui l'attendait en bas de chez elle. Avec un peu de chance elle trouverait une meilleure vie là bas ? Mais la chance n'a pas été de son côté, au contraire, et dix sept mois après son départ c'est Casilda qui lui demande de rentrer pour l'aider à gérer l'un de ses frères qui se laissait doucement mais sûrement sombrer. Lulla plaque alors sa vie sereine et bien rangée pour retourner dans cet appartement qui l’écœurait. Un mois plus tard c'est Ryan qui renonça et décida de se laisser tomber du haut du toit de l'immeuble, n'en pouvant plus de cette vie bordélique et décousue, dont personne ne sortait jamais vraiment indemne.

NOWADAYS. Une rencontre dans un bar. Un mariage. Un bébé. Qui aurait pu dire que le bonheur se résumait à si peu de choses ? Depuis sa rencontre avec Dylan il faut avouer que sa vie a changé du tout au tout : elle se sent enfin stable, bien que fragile. Les sourires sont devenus de moins en moins rares sur son visage, elle s'est ouverte, épanouie ; s'est remise à dessiner pendant un temps. Puis grâce à la suppression de cette loi idiote qui les obligeait à se cacher elles se sont mariées. La suite logique ? Fonder une famille. Même si elle avait peur que l'armée ou ces foutues bombes aient raison de sa chère et tendre Lullaby ne s'est pas vraiment fait prier pour avoir un enfant avec sa douce ; enfant qu'elle porterait bien sûr. Comment aurait-elle pu exiger de Dylan qu'elle porte leur enfant alors qu'elle ne renoncerait pas à l'armée ? Impossible. Elles cherchèrent donc un géniteur des semaines durant et c'est finalement le meilleur ami de la femme soldat qui s'imposa comme géniteur non pas par la ruse ou la tendresse ... mais par la force. Bien sûr la douce Lulla n'a jamais avoué les véritables conditions dans lesquelles elle est tombée enceinte à son épouse, autant pour éviter de la blesser que pour ne pas la braquer. Après tout est ce qu'elle la croirait ? La rancœur et le chagrin la tirèrent vers la dépression durant sa grossesse mais la naissance de Chiara et son amour pour cette petite princesse, leur fille, l'aida à reprendre le dessus et à profiter pleinement de cette vie qui était désormais la leur. A toutes les trois.
Ce « désormais » n'est plus vraiment d'actualité puisqu'il date déjà d'il y a un an. Et beaucoup de choses ont changé depuis. Déjà sur le thème de l'amour : sa femme, l'amour de sa vie, sa Dylan est décédée. Morte lors d'une énième mission en Irak à laquelle la maman au foyer a pourtant insisté pour qu'elle ne parte pas. Lullaby a donc été obligée de quitter la base et de trouver un appartement - beau duplex - où élever sa fille décemment. Mais malheureusement ... Comment élever une petite fille d'une façon correcte quand on était seule pour ça ? La belle ne montrait pas sa détresse mais le quotidien, sans son épouse, était beaucoup plus difficile. Son cœur était encore convalescent elle ne se le cachait pas. Retrouver une vie normale prendrait du temps.